Casal Balaguer, la renaissance d’un palais majorquin

Dans le quartier commerçant entre les Ramblas et le Paseo del Born, parmi les boutiques de marques et les bars branchés, prenez le temps de franchir l’imposante porte de la Casa Balaguer et de plonger dans le passé resplendissant de Palma.
Symbole d’un monde en voie de disparition
L’île de Majorque attire les voyageurs depuis bien longtemps et au XIXème siècle sa capitale, Palma, contrastait avec l’agitation des grandes villes européennes. Elle était une source d’inspiration pour les artistes et les voyageurs romantiques, qui la considéraient comme une ville à la fois gothique et orientale.
Construits à partir du XIIIème siècle, les palais ou manoirs « casas señoriales » ont vécu leur moment de splendeur maximale au XVIIIème siècle. De nos jours il ne reste que 15 des presque 130 demeures magnifiques que Palma comptait autrefois.

15 palais qui conservent dans leur ensemble la structure d’origine, les meubles et tableaux qui les caractérisaient. Symbiose parfaite des styles gothique, islamique, renaissance et baroque, les palais majorquins sont indissociables de la beauté envoutante de la vieille ville de Palma.
Au XVIIIe siècle, ces palais étaient un emblème du système social et économique dont la disparition débuta dès le premier tiers du XIXe siècle avec le premier gouvernement libéral et la fin de l’ancien régime, suivant ainsi leurs sœurs campagnardes, les possesiones.
Et à partir de ce moment, une longue période de décadence a commencé pour eux, qui continue jusqu’à ce jour.
Casal Balaguer sauvée in extremis
Casal Balaguer, également connu sous le nom de Can Marquès del Reguer et Can Blanes, est située au centre de la vieille ville de Palma, non loin du Gran Hotel, chef d’œuvre du Modernisme à Majorque.
Au XIIIème siècle il s’agissait d’un ensemble de petites maisons médiévales rachetées au XVIème siècle par Joan Sanglada-Gual. Son fils Mateu Sanglada-Gual y Truiols, à la fois noble et corsaire en fit sa résidence principale et transforma l’ensemble en un palais digne de sa position.
C’est cette dernière étape baroque qui donne au bâtiment son caractère actuel, défini par une grande cour centrale qui apporte de la lumière à la plupart des pièces.

Au XIXème siècle, ses héritiers vendirent la maison à une riche famille bourgeoise d’Artá, les Blanes et finalement Josep Balaguer la racheta en 1927. Musicien, homme d’affaires, collectionneur et mécène, Josep Balaguer (Inca, 1869- Palma, 1951) a été une figure clé dans la dynamisation culturelle de la ville pendant la première moitié du XXème siècle.
A sa mort et conformément à son testament, ses sœurs ont fait don de l’édifice à la ville afin qu’il accueille le « Circulo de Bellas Artes » de Palma.
Peu entretenue dans la seconde moitié du XXe siècle, Casal Balaguer a bien failli tomber en ruine. En 2009, La mairie de Palma a récupéré la gestion de l’édifice après avoir conclu un accord avec le Circulo de Bellas Artes.
La réhabilitation de Casal Balaguer a été réalisée par un grand cabinet d’architectes, Francesc Pizá, M.José Duch, Ricardo Flores et Eva Prats.

Le projet a été présenté lors de 2 éditions de la Biennale d’Architecture de Venise, en 2014 et 2016, et a été sélectionné pour le Prix International Mies Van der Rohe 2015 et finaliste de la dernière édition des FAD Architecture Awards 2016. En 2017, la réhabilitation a reçu le Prix d’architecture Guillem Sagrera 2018.
Ce palais est devenu aujourd’hui une destination à visiter non seulement pour ses expositions mais aussi pour son travail impeccable de restauration architecturale.
Un nouvel espace emblématique et pluridisciplinaire pour Palma
De par ses caractéristiques et son emplacement, Casal Balaguer est idéale pour expliquer l’évolution des demeures seigneuriales de Palma ainsi que pour garder et mettre en valeur une partie du patrimoine mobilier de la mairie.
L’étage noble est exclusivement consacré à cette fonction avec le musée appelé « la Casa possible » ainsi que des salles de concert et d’exposition. Le 2ème étage accueille une bibliothèque spécialisée en art, une salle de conférence et le siège du Círculo de Bellas Artes.

Le rez-de-chaussée, dont le patio est le plus grand de tous les palais majorquins héberge une salle d’exposition, un centre de documentation auxiliaire sur le patrimoine, un espace éducatif avec des ressources pédagogiques et une cafétéria.
La Casa Possible
La visite de cette exposition permanente gratuite commence par un petit hall dans lequel est installée une grande maison de poupées de la fin du XIXème siècle provenant de Can Morell (actuelle Casal Solleric)
Cette maison de poupées expose tous les espaces d’une maison de maître même la cuisine, le garde-manger, le quartier des domestiques et les toilettes. La fidélité avec laquelle ils ont été reproduits est stupéfiante comme le bois des meubles, les revêtements muraux ou les sols.

En poursuivant la visite vous découvrirez un salon Louis XV, une chambre baroque avec son alcôve, une salle à manger du XIXème siècle, une galerie de collection de peintures ayant appartenue à Josep Balaguer, avec des oeuvres du peintre majorquin Antoni Gelabert mais aussi provenant de pièces acquises par la mairie de Palma représentatives de l’évolution des arts somptuaires de Majorque.
Dans la salle de musique se trouve un orgue de pointe que Josep Balaguer acheta en 1930 à Ludwigsburg. Ce dernier est une merveille de technique, capable de reproduire les sons les plus variés dont ceux qui imitent les percussions, ce qui est assez inhabituel.
Prenez le temps de découvrir l’audace de l’architecture de la Casa Balaguer conciliant passé et présent. Elle ne vous laissera pas indifférent.
Centro cultural Can Balaguer
Carrer de la Unió, 3 – 07001 Palma
Ouvert du mardi au samedi de 10:00 à 18:00 et de 11:00 à 14:00 le dimanche.
Tel: 971 2259 00 / canbalaguer@palma.cat
Crédits photos: Can Balaguer.cat, estilopalma.com
Arrivée à Palma en 1986 pour un court séjour, j’ai rapidement réalisé que j’avais enfin trouvé l’endroit idéal. Omniprésence de la mer, douceur de vivre et une petite librairie franco-anglaise, Book-Inn, où durant dix ans j’ai pu partager ma passion pour la lecture avec les nombreux majorquins férus de culture française. Titulaire d’un diplôme d’état de psychomotricienne, j’ai collaboré en tant que bénévole avec le centre ASPACE, parcouru l’île pendant 3 ans pour une agence de location saisonnière, donné des cours de français à l’Instituto Lluliano.
Comme André Brink, je pense qu’il n’existe que deux espèces de folie contre lesquelles on doit se protéger. L’une est la croyance selon laquelle nous pouvons tout faire et l’autre est celle selon laquelle nous ne pouvons rien faire.