Les réserves d’eau de Majorque
Pourquoi l'eau est-elle si précieuse à Majorque ? D'où vient-elle ? Où est-elle conservée ?

L’eau est précieuse partout bien sûr, mais elle l’est encore plus sur des territoires dont les ressources sont limitées, comme les Îles Baléares. En été, nous sommes beaucoup plus nombreux sur l’archipel, mais les réserves d’eau sont les mêmes…
En connaissant mieux l’histoire de l’eau à Majorque, vous comprendrez pourquoi nous devons tous être vigilants et en faire un usage raisonnable.
D’où vient l’eau à Majorque ?
Les Aquifères
Ce sont des réservoirs souterrains naturels alimentés par les eaux de pluie qui s’infiltrent dans le sol. L’eau est extraite à travers des puits. Ils en existent 18 sur l’île. En ce début 2023, les réserves des principaux aquifères, Almadrava à Pollença, Penya Flor à Alaró, Sa Marineta à Petra et San Jordi à Palma, sont inférieures à 40%. Une situation préoccupante pour cet été.
Il faut savoir qu’à l’exception de Palma, qui utilise l’eau des embalses de Cúber et Gorg Blau pour moins de 30 % de sa consommation, le reste de l’île est alimenté uniquement par l’eau des aquifères ou des usines de dessalement.

Les sources naturelles
Les sources naturelles constituent l’un des apports fondamentaux de l’approvisionnement en eau de Palma depuis l’époque musulmane. Elles fournissent 17% du total des captages. Il s’agit de sources naturelles qui jaillissent, amenant l’eau à la surface en traversant une faille rocheuse. Les trois principales sont :
- La source de la Vila, près de la UIB, l‘université des Baléares. Documentée dès le XIe à l’époque musulmane, Ayn Al-amir alimentait un réseau de canaux d’irrigation et de qanats qui servaient à distribuer l’eau des fontaines pour l’irrigation des vergers et l’approvisionnement de la ville. Actuellement son débit est constant tout au long de l’année et elle fournit une moyenne annuelle de 69% de l’eau totale des sources.
- La source de Mestre Pere, vers Palmanyola est une source saisonnière dont le débit est presque nul en été, mais qui peut être utilisée au printemps. Un grand canal d’irrigation recueille l’eau et l’achemine vers les étangs de Na Sardana. Aujourd’hui, il fournit une moyenne annuelle de 15% du volume total des sources.
- La source d’en Baster située dans la possession de Son Quint à Esporles est le résultat d’un mécanisme de collecte de l’eau qanat datant de l’ère islamique et consistant en une galerie souterraine qui draine l’eau vers la surface. Elle a été murée en 1888 et fournit actuellement une moyenne annuelle de 16% de l’approvisionnement total en eau des sources.

Les embalses de Cúber et de Gorg Blau
Ces réservoirs artificiels sont des infrastructures de régulation et de contrôle des ressources en eau basées sur un barrage de retenue. Ils servent à éviter le manque d’eau pendant les longues périodes de sécheresse et à la stocker jusqu’à l’été, période de plus grande demande.
Les réservoirs de Gorg Blau (7,36Hm3) et de Cúber (4,64Hm3) sont situés dans la même vallée qui sépare les deux sommets les plus élevés de Majorque : le Puig Major et le Puig de Massanella, dans la Serra de Tramuntana. Ils recueillent les eaux de fonte et de ruissellement qui sont naturellement drainées par le torrent Gorg Blau et le torrent Almadrá.
Leur construction a commencé au début des années 1970 en raison d’une augmentation soudaine de la demande en eau. EMAYA (compagnie municipale des eaux et des égouts de Palma) les exploite depuis 1971. L’apport moyen pour la ville de Palma est de 20,4 % de la totalité de l’eau consommée.
Les réservoirs de Cúber et du Gorg Blau ont débordé pour la dernière fois en janvier 2017. EMAYA a dû ouvrir les barrages pour détourner l’excédent d’eau vers le lit des torrents alors qu’une autre partie a été stockée dans les réservoirs de Son Anglada.
Les desaladoras, quand les sources ne suffisent plus
Le système de dessalement de ABAQUA, (Agència Balear de l’Aigua i la Qualitat Ambiental) est chargé de transformer l’eau salée de la mer en eau potable. Dans le cas de Majorque, il existe 3 stations de dessalement à Palma, Andratx et Alcúdia qui utilisent le procédé d’osmose inversée. Le coût de cette opération pour le Govern Balear a presque atteint les 6 millions d’Euros en 2022.

Quelle est la situation en 2023 des réserves d’eau ?
Majorque est en pré-alerte de sécheresse depuis presque 2 ans. Le tourisme est un grand consommateur d’eau. Le conseiller du gouvernement pour l’environnement et le territoire, Miquel Mir, prévient que si 16 millions de touristes reviennent cet été 2023, comme ce fut le cas pour la saison 2022, la situation hydrique des îles sera très « critique ». Des restrictions en pleine saison touristique ne sont pas exclues.
Tout cela se produit après un mois de décembre et de janvier au cours duquel tous les aquifères de Majorque ont vu leurs réserves menacées par la sécheresse.

Le début du dégel de la neige accumulée dans la Serra de Tramuntana au cours des deux dernières semaines de février a entraîné une augmentation des réserves de Cúber et de Gorg Blau, qui atteignent 65,70 %, un pourcentage encore loin des 81 % enregistrés en 2022 à la même époque.
En mars , avec le passage de la tempête Juliette, les précipitations neigeuses ont été impressionnantes. Malgré les dégâts qu’elle a laissés dans la Serra de Tramuntana, Juliette a permis d’augmenter les réserves d’eau de 12% par rapport à février.
Outre le manque de précipitations, d’autres aspects mettent en péril la durabilité de l’approvisionnement en eau de la population. C’est le cas des fuites à travers les réseaux municipaux et des effets évidents du changement climatique. Ce dernier provoque de plus en plus de pluies torrentielles qui rechargent moins les aquifères que les pluies modérées.
Crédit : Ultima Hora, Diario de Mallorca, Emaya
Arrivée à Palma en 1986 pour un court séjour, j’ai rapidement réalisé que j’avais enfin trouvé l’endroit idéal. Omniprésence de la mer, douceur de vivre et une petite librairie franco-anglaise, Book-Inn, où durant dix ans j’ai pu partager ma passion pour la lecture avec les nombreux majorquins férus de culture française. Titulaire d’un diplôme d’état de psychomotricienne, j’ai collaboré en tant que bénévole avec le centre ASPACE, parcouru l’île pendant 3 ans pour une agence de location saisonnière, donné des cours de français à l’Instituto Lluliano.
Comme André Brink, je pense qu’il n’existe que deux espèces de folie contre lesquelles on doit se protéger. L’une est la croyance selon laquelle nous pouvons tout faire et l’autre est celle selon laquelle nous ne pouvons rien faire.